Cheval de bataille de tous les gouvernements successifs, la fraude fiscale représente un manque à gagner estimé entre 80 et 100 milliards d'euros par an. Et les résultats ne s'améliorent pas. Pour traquer plus efficacement les mauvais payeurs, Bercy a décidé de s'armer d'un outil technologique de pointe basé sur l'intelligence artificielle (IA) capable d'agréger et d'analyser des millions d'informations sur les entreprises et les foyers français. Un logiciel à 20 millions d'euros censé compenser les 3000 postes de contrôleurs supprimés et enfin renflouer les caisses.

iStock.com-metamorworks
100 milliards d'euros de fraude fiscale
Les chiffres donnent le vertige : l'évitement illégal de l'impôt s'élèverait à près de 100 milliards d'euros selon le premier syndicat des agents des impôts, Solidaires finances publiques. Or les contrôles fiscaux n'ont permis de rapporter que 18 milliards en 2017. Pourtant le Service des traitements des déclarations rectificatives mis en place en 2013 a bien fonctionné et les fraudeurs repentis ont permis au fisc de récupérer 8,3 milliards d'euros. Problème, cette cellule a fermé fin 2017 et l'argent ne rentre plus. Bercy compte ouvrir cette année un guichet du même type à destination des entreprises qui feraient amende honorable quant à leurs montages illégaux en échange de pénalités réduites. Même si ces méthodes, qui ressemblent à un aveu de faiblesse, font grincer des dents à la CGT du ministère, elles restent un bon moyen de récupérer de l'argent alors que les contrôles fiscaux à proprement parler ne rapportent plus guère. D'autant que les contrôleurs sont de moins en moins nombreux. En effet depuis 2010 et alors qu'une centaine de mesures antifraude ont été votées, plus de 3100 postes sur 12 000 ont été supprimés. Ce qui a pour conséquence immédiate une réduction du nombre de contrôles, et donc de redressements...
Une cellule baptisée Mission requêtes et valorisation
Pour gagner en efficacité avec des effectifs réduits, la DGFiP (Direction générale des finances publiques) pense avoir trouvé la solution : un logiciel d'IA capable de traiter une base de données considérable afin de traquer les fraudeurs. Et le fisc s'est donné les moyens de ses ambitions. Pas moins de 20 millions d'euros ont été investis sur cinq ans pour mettre au point cet outil. Une cellule spéciale de data mining (fouille de données) baptisée MRV (Missions requêtes et valorisation) comptant 22 informaticiens de pointe a ainsi été mise sur pied. Depuis 2015, ils ont réuni les fichiers de 5 millions d'entreprises imposables en y agrégeant les données publiques dont ils disposaient (registre de commerce, dépôts de marques et brevets...). En 2017, ce sont les informations de 37 millions de foyers français qui ont été intégrées à la base de données. Un outil qui a « une double valeur ajoutée » explique le chef de la cellule Philippe Schall au site challenges, « d'abord grâce aux multiples croisements de données [qui permettent] à tout contrôleur de démultiplier la pertinence de ses requêtes (...), ensuite nos algorithmes [aident à] modéliser des indicateurs de fraude et donc identifier automatiquement des cas suspects ».
Traque et réseaux sociaux
Si les contrôleurs fiscaux scrutent déjà les réseaux sociaux de certains profils suspects, Bercy veut aller plus loin et généraliser le process. Une demande d'agrément a ainsi été faite par la MRV auprès de la CNIL pour utiliser son outil IA sur les réseaux sociaux.
17 commentaires
Vous devez être membre pour ajouter un commentaire.
Vous êtes déjà membre ? Connectez-vous
Pas encore membre ? Devenez membre gratuitement
Signaler le commentaire
Fermer